Les objets quantiques intriqués peuvent être utilisés pour mettre en réseau des systèmes séparés. Les chercheurs démontrent ce qui est nécessaire pour les corrélations non locales, une condition pour un réseau quantique utile. Crédit : Grainger College of Engineering de l’Université de l’Illinois Urbana-Champaign/Wesley Moore
Des chercheurs ont mis au point un cadre théorique qui permet de mieux comprendre la nonlocalité quantique, une propriété essentielle pour que les réseaux quantiques soient plus performants que la technologie classique. Leur étude a unifié les recherches antérieures sur la non-localité et a montré que la non-localité n’est réalisable qu’à travers un ensemble restreint d’opérations quantiques. Ce cadre pourrait permettre d’évaluer la qualité des réseaux quantiques et d’élargir notre compréhension de la non-localité.
Sommaire
Introduction et vue d’ensemble
Une nouvelle étude théorique a été menée, fournissant un cadre pour comprendre la non-localité. Il s’agit d’une caractéristique cruciale que les réseaux quantiques doivent présenter pour accomplir des tâches irréalisables par les technologies de communication traditionnelles. Les chercheurs impliqués ont clarifié le concept de non-localité, en décrivant les conditions nécessaires pour établir des systèmes avec des corrélations quantiques puissantes.
Nonlocalité et informatique quantique
Publiée dans la revue Physical Review Letters, l’étude a adapté des techniques de la théorie de l’informatique quantique pour former un nouveau système de classification de la non-localité quantique. Cette adaptation a non seulement permis aux chercheurs de fusionner les études antérieures du concept dans un cadre unique, mais aussi de prouver que les systèmes quantiques en réseau ne peuvent présenter la non-localité que s’ils possèdent un ensemble spécifique de caractéristiques quantiques.
Eric Chitambar, professeur d’ingénierie électrique et informatique à l’université de l’Illinois Urbana-Champaign et chef de projet, explique : « À première vue, l’informatique quantique et la non-localité dans les réseaux quantiques sont deux choses différentes, mais notre étude montre que, d’une certaine manière, ce sont les deux faces d’une même pièce. En particulier, elles nécessitent le même ensemble fondamental d’opérations quantiques pour produire des effets qui ne peuvent pas être reproduits avec la technologie classique.
Les conséquences de l’intrication
La non-localité est une conséquence de l’intrication, un processus par lequel des objets quantiques maintiennent des connexions fortes même lorsqu’ils sont séparés par de grandes distances physiques. Lorsque des objets intriqués sont utilisés dans des opérations quantiques, les résultats présentent des corrélations statistiques inexplicables par des moyens non quantiques. Ces corrélations sont décrites comme étant non locales. Un réseau quantique doit posséder un certain degré de non-localité pour garantir sa capacité à exécuter des fonctions véritablement quantiques. Toutefois, ce phénomène reste mal compris.
La non-localité comme ressource
Pour améliorer l’étude de la non-localité, M. Chitambar et Amanda Gatto Lamas, étudiante diplômée en physique, ont appliqué le formalisme de la théorie des ressources quantiques. Ils ont traité la non-localité comme une « ressource » à gérer. Cette approche leur a permis de considérer les études précédentes sur la nonlocalité comme des instances distinctes du même concept, bien que la disponibilité de la ressource soit soumise à des limitations variables. Cette stratégie a finalement facilité la preuve de leur principale conclusion : la non-localité ne peut être obtenue qu’avec un ensemble restreint d’opérations quantiques.
Comprendre les réseaux quantiques
« Notre résultat est l’analogue pour les réseaux quantiques d’un résultat important de l’informatique quantique appelé le théorème de Gottesman-Knill », explique Gatto Lamas. « Alors que Gottesman-Knill définit clairement ce qu’un ordinateur quantique doit faire pour surpasser un ordinateur classique, nous montrons qu’un réseau quantique doit être construit avec un ensemble particulier d’opérations pour faire des choses qu’un réseau de communication standard ne peut pas faire.
Applications et perspectives futures
M. Chitambar est convaincu que ce cadre servira d’outil pour élaborer des critères permettant d’évaluer la qualité d’un réseau quantique en fonction de son degré de non-localité. En outre, il pense qu’il peut être utilisé pour élargir la compréhension de la non-localité.
« À l’heure actuelle, on comprend relativement bien le type de non-localité qui peut émerger entre deux parties », a-t-il déclaré. « Cependant, on peut imaginer pour un réseau quantique composé de nombreuses parties connectées qu’il pourrait y avoir une sorte de propriété globale que l’on ne peut pas réduire à des paires individuelles sur le réseau. Une telle propriété pourrait dépendre intimement de la structure globale du réseau ».
Référence : « Multipartite Nonlocality in Clifford Networks » par Amanda Gatto Lamas et Eric Chitambar, 5 juin 2023, Physical Review Letters.
DOI: 10.1103/PhysRevLett.130.240802
Chitambar est également membre de l’Illinois Quantum Information Science and Technology Center. Cette étude est l’aboutissement d’un travail commencé lorsque Gatto Lamas participait au programme Research Experience for Undergraduates organisé par le département de physique de l’Université de l’Illinois.
Le programme Q-NEXT dirigé par le laboratoire national Argonne du ministère américain de l’énergie a apporté son soutien.