De nouvelles recherches remettent en question les théories existantes sur l’émergence de la vie

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La croûte terrestre il y a des milliards d'années

La tectonique des plaques implique le mouvement horizontal et l’interaction de grandes plaques à la surface de la Terre. De nouvelles recherches indiquent que la tectonique des plaques mobile, considérée comme nécessaire à la création d’une planète habitable, n’existait pas sur Terre il y a 3,9 milliards d’années. Crédit : illustration de l’Université de Rochester / Michael Osadciw

Une équipe multi-institutionnelle a trouvé des preuves que le champ magnétique de la Terre était stable il y a 3,9 à 3,4 milliards d’années, lorsque la vie serait apparue, ce qui suggère que les continents étaient fixes et ne subissaient pas de tectonique des plaques, remettant ainsi en question la croyance selon laquelle la tectonique mobile des plaques est essentielle à l’apparition de la vie.

Les recherches d’un membre de la faculté de l’université d’État de Floride (FSU) permettent d’en savoir plus sur les conditions nécessaires à l’apparition de la vie sur Terre.

Richard Bono, professeur adjoint à la FSU, a fait partie d’une équipe multi-institutionnelle qui a trouvé des preuves que le champ magnétique de la planète était stable il y a 3,9 à 3,4 milliards d’années, époque à laquelle les scientifiques pensent que la vie est peut-être apparue pour la première fois. Leurs recherches ont été publiées dans la revue Nature.

Bono en dit plus sur les découvertes de l’équipe et leurs implications pour les origines de la tectonique des plaques et de la vie sur Terre.

Richard Bono, professeur adjoint à l’Université de l’Etat de Floride. Crédit : Université d’État de Floride

Qu’a trouvé l’équipe de recherche ?

Nos recherches ont montré que le champ magnétique terrestre était stable il y a 3,9 à 3,4 milliards d’années, ce qui correspond aux plus anciens fossiles connus. Contrairement aux recherches antérieures, qui ont pris des données d’un seul site, nous avons mesuré les porteurs magnétiques trouvés dans le minéral zircon de deux anciennes masses continentales distinctes. Les résultats suggèrent que le champ magnétique était stable et presque identique pendant plus d’un demi-milliard d’années. Ce champ invariable pourrait s’expliquer par la présence de continents fixes, mais pendant la majeure partie de l’histoire de la Terre, les plaques rocheuses qui constituent les continents étaient en mouvement constant à la surface de la planète – un phénomène appelé tectonique des plaques. Cette découverte nous aide à déterminer quand la tectonique des plaques mobiles a pu commencer.

Pourquoi est-ce important ?

La tectonique des plaques est considérée comme l’un des facteurs fondamentaux de l’existence de la vie sur Terre. La configuration actuelle des continents et des océans, ainsi que des supercontinents comme la Pangée, est due à la tectonique des plaques. Par la création et la destruction de la croûte rocheuse, la tectonique des plaques est censée contrôler le cycle des éléments nécessaires à la vie. Cependant, on ne sait pas quand la tectonique des plaques mobiles a commencé. Si la vie est apparue sur Terre il y a environ 3,8 milliards d’années, c’était pendant ce régime stagnant. Cette découverte suggère que la tectonique des plaques mobile moderne n’est pas une condition nécessaire à l’apparition de la vie, ce qui nous permet de mieux comprendre ce qui rend une planète habitable.

Comment cette étude a-t-elle élargi notre compréhension de la Terre ?

Des recherches antérieures ont mis en évidence la présence d’un champ magnétique provenant du noyau de la Terre il y a 4,2 milliards d’années. Mais ces données provenaient uniquement d’Australie. Comme elles provenaient d’un seul continent, nous ne pouvions pas les utiliser pour détecter le mouvement des plaques. Cette étude ajoute de nouvelles données provenant d’un autre continent, ce qui nous permet d’étudier les variations relatives de l’intensité du champ magnétique à partir de différents endroits, ce qui pourrait nous aider à déduire un éventuel mouvement des plaques.

Comment avez-vous terminé vos recherches ?

Nous avons analysé des échantillons de roches collectés lors d’expéditions sur le terrain en Australie et en Afrique du Sud, à la recherche de grains de zircon individuels d’une taille inférieure à un millimètre. Nous avons mesuré l’intensité de l’aimantation de l’échantillon dans un laboratoire protégé magnétiquement à l’université de Rochester en chauffant le grain de l’échantillon à l’aide d’un laser et en mesurant l’évolution de l’aimantation à l’aide d’un magnétomètre à ultra-haute sensibilité. Nous avons également mesuré l’âge de chaque grain de zircon à la Commission géologique du Canada à l’aide d’une microsonde ionique à très haute résolution.

Grâce à ces nouvelles données, nous avons pu effectuer de nouvelles analyses statistiques et les comparer aux modèles existants de mouvement des plaques. Nous avons constaté que ce que nous avons vu dans notre nouvel ensemble de données ne pouvait pas s’expliquer par une variation normale des processus de tectonique des plaques à l’œuvre depuis au moins les 600 derniers millions d’années.

Qui d’autre a participé à cette recherche ?

Cette étude est le fruit d’un travail multi-institutionnel mené par John Tarduno, professeur à l’université de Rochester, avec d’autres coauteurs du Service géologique du Canada, de l’université de Californie à Santa Cruz, de l’université de Johannesburg, de l’université du Witwatersrand, de l’université d’Arizona, de l’université du KwaZulu-Natal et du Service géologique du Japon. La recherche a été soutenue par la National Science Foundation.

Pour en savoir plus sur cette recherche, voir La vie est née d’un « couvercle stagnant » et non de la tectonique des plaques.

Référence : « Hadaean to Palaeoarchaean stagnant-lid tectonics revealed by zircon magnetism » par John A. Tarduno, Rory D. Cottrell, Richard K. Bono, Nicole Rayner, William J. Davis, Tinghong Zhou, Francis Nimmo, Axel Hofmann, Jaganmoy Jodder, Mauricio Ibañez-Mejia, Michael K. Watkeys, Hirokuni Oda et Gautam Mitra, 14 juin 2023, Nature.
DOI: 10.1038/s41586-023-06024-5